Garage Francis Pierrot à Vrécourt, trois générations de garagistes dans la passion Citroën
2CV-MCC | 28 juin 2022Chez les Pierrot, la profession de garagiste est une tradition familiale. Il y a tout d’abord eu le grand-père, Paul Pierrot qui, le premier, a ouvert au début des Années trente un garage. Il s’installe alors à Vrécourt dans le département des Vosges, à une trentaine de kilomètres à l’ouest d’Epinal à la limite avec la Haute-Marne.
Paul Pierrot commence alors comme agent de la marque Donnet-Zedel. En 1939, il est mobilisé et avant de partir sous les drapeaux, par précaution, il démonte sa Donnet-Zedel et la cache. Fait prisonnier, il est interné en Allemagne et ne revient chez lui qu’en 1945. Il rouvre alors son garage, remonte sa voiture et reprend son activité. Le travail ne manque pas. Il devient agent Citroën, Donnet ayant fait faillite à la fin de l’année 1934… Il connaît alors cette période de reconstruction pendant laquelle Citroën relance ses modèles d’avant-guerre avec les camions T 45 et U 23 et les Traction 11 et 15. Mais c’est aussi la grande époque des premières nouveautés avec le Type H puis la 2 CV qui connaissent tous deux le succès que l’on sait. A l’agence Pierrot, les acheteurs de 2 CV doivent attendre au minimum deux ou trois ans pour être livrés. Mais, si l’un deux achète un camion, l’usine lui permet d’obtenir une 2 CV sans délai… Le garage se développe au fil des ans. Une Berliet est achetée comme véhicule de service et transformée en camionnette. Elle est rapidement épaulée par une Citroën 10 A « Rosalie » qui fait une excellente dépanneuse après avoir reçu un moteur culbuté de U 23 et des freins hydrauliques en lieu et place de ses freins à câbles d’origine. Elle laissera ensuite sa place à un Dodge 6 x 6 avec treuil racheté aux surplus militaires des Domaines qui sera lui-même remplacé par un Belphégor Diesel équipé en porte-voiture basculant. A partir du milieu des Années cinquante jusqu’à la fin des Années soixante, Paul Pierrot est aussi concessionnaire des tracteurs de la marque allemande Bautz.
Lorsqu’il prend sa retraite au début des Années soixante-dix, travaillent avec lui ses trois fils, André, Roger et Jean-Robert, ainsi que quatre ouvriers et un petit apprenti. Mais le garage est trop petit et n’est plus fonctionnel compte tenu de son volume d’activité. Il est donc décidé d’acheter un terrain dans le centre du bourg, non loin de la mairie et de la poste, et d’y construire de nouveaux locaux plus grands et mieux aménagés. Le bâtiment fait 500 m2 au total dont 450 pour l’atelier ! Le déménagement est fait en 1972.
Francis Pierrot, fils d’André, grandit dans cet univers de mécanique automobile. Logiquement, il suit la voie tracée par son grand-père et son père. Il passe en deux ans un BEP et un CAP de mécanique automobile au lycée de Gérardmer, puis suit une formation rémunérée pour obtenir un CAP de carrosserie. Ses diplômes en poche, il travaille un temps au garage familial puis part à l’armée en décembre 1980. Là, il est affecté dans le Génie de l’Armée de l’air au 15e RGA à Toul où il est en charge de l’entretien courant des véhicules écoles. Une fois libéré, il entre à la carrosserie Farnier à Neufchâteau. Il se spécialise alors dans l’utilisation des marbres et suit pour cela une formation chez Blackhawk à Strasbourg. Il travaille aussi à rallonger des Type H neufs pour en augmenter le volume utile. Il reste chez Farnier jusqu’en 1999, année où il prend la suite de son père et de ses oncles à la tête du garage familial. Devant les exigences grandissantes du réseau Citroën, il ne conserve le panneau d’agent que jusqu’en 2003 et décide alors de devenir Point Relais 2CV-MCC. Francis Pierrot est en effet passionné de 2 CV et de modèles dérivés avec un attachement particulier pour l’Ami 6 en version Berline et en version Break. Il lit aussi régulièrement les revues consacrées à ces modèles. Il connaît donc notre entreprise depuis plusieurs années et effectue régulièrement chez nous des achats. Il apprécie tout particulièrement de pouvoir se fournir en pièces d’origine dont la qualité est conforme à celle des pièces que fournissait Citroën. Aujourd’hui, ils ne sont plus que deux au garage Pierrot, lui et Laurent Saint-Dizier, un ouvrier-mécanicien qui est là depuis l’âge de 16 ans et il en a maintenant 55 ! Il avait été embauché du temps de son père et ses oncles. C’est d’ailleurs lui qui prend en charge toutes les opérations sur les voitures modernes tandis que Francis se charge de l’entretien et des restaurations des 2 CV et modèles dérivés. Agé de 61 ans, ce dernier pense évidemment à prendre sa retraite. Mais l’affaire familiale poursuivra son activité puisque son neveu, Valentin Pierrot, qui est actuellement mécanicien poids lourd chez RVI, a déjà prévu de prendre la suite d’ici environ deux ou trois ans. Ce sera la quatrième génération… L’avenir est donc assuré, et cela fait particulièrement plaisir à Francis Pierrot de voir perdurer ainsi la tradition familiale !
Trois questions à Francis Pierrot
Interview expresse :
● Qu’est-ce qui vous plaît avant tout dans la 2 CV et dans la Méhari ?
– « Ce qui me plaît surtout, c’est la 2 CV en général, toute la 2 CV dans sa globalité. Elle est avant tout une voiture simple. Elle a été conçue pour çà. La Méhari, c’est autre chose. Le plastique, ça reste du plastique… Pour le carrossier traditionnel que je suis, ça reste déroutant, surtout avec ces structures tubulaires destinées à supporter la carrosserie et qui sont de véritables nids à rouille. Ici, dans l’Est de la France, avec les hivers que nous avons et tout le sel qui était déversé sur les routes, cela tournait vite à la catastrophe. Pourquoi à l’époque tout cela n’était pas mieux protégé de la corrosion ?! C’est pour cela que j’aime mieux refaire une 2 CV qu’une Méhari. Actuellement, j’en ai une en chantier dans mon garage. Mais elle a été repeinte deux ou trois fois. On ne sait jamais quel type de peinture a été utilisé et si, avec le temps, cela va faire des réactions, si cela va travailler. Sinon, j’aime bien aussi l’Ami 6, surtout avec la finition Club et ses quatre phares. C’est vraiment une voiture confortable avec laquelle on peut faire de la route dans un véritable confort. Elle est différente de la 2 CV et est moins courante. L’Ami 8 aussi est très intéressante. Comme l’Ami 6, c’est une voiture faite pour les longues distances et où l’on sent que le confort a été volontairement privilégié. »
● Quel est votre modèle préféré ?
– « J’ai deux modèles préférés, la 2 CV de ma jeunesse, une 2 CV AZLP Gris Clair AC 132 de 1959 à roues de 380, et ma 2 CV 6 Vert Bambou de 1979 à phares rectangulaires qui n’a que 50 000 km. La 2 CV de 1959, c’est ma première voiture, et je l’ai toujours aujourd’hui ! Elle est très intéressante. Elle fait partie de celles qui ont été équipées d’origine par Citroën, à titre d’essai, de demi-arbres de transmission à joint homocinétiques. Il s’agissait alors de tester ceux qui seront montés sur la future Ami 6 lancée en avril 1961. A l’époque, je l’avais un peu modifiée pour la moderniser. Je l’avais équipée par exemple d’un moteur de 18 ch et de sa boîte de vitesse. J’avais aussi monté des essuie-glaces électriques. Mais j’avais précieusement gardé toutes les pièces d’origine. J’ai donc tout ce qu’il faut pour la remettre conforme le jour où je la restaurerai. D’ailleurs, j’en ai une autre du même modèle que j’ai mise de côté pour pièces en prévision. Je possède aussi une authentique Citroën 5 HP Trèfle. Elle est de 1925. C’est une des dernières avec les ailes rondes. Je l’ai achetée il y a plus de 40 ans au concessionnaire de Neufchâteau. Je l’ai entièrement refaite, y compris l’armature en frêne avec l’aide d’un ami menuisier-ébéniste. »
● Quel est votre meilleur souvenir de petite Citroën ?
– « Quand nous étions enfants, avec ma sœur et mon frère, nos parents nous emmenaient souvent le dimanche nous promener avec l’Ami 6 de mon père. Nous partions sur les petites routes des Vosges. Nous faisions environ 40 à 80 kilomètres. C’était toujours l’occasion de découvrir des paysages et des petits coins de campagne charmants où le temps semblait s’être arrêté. J’ai toujours continué à me promener de cette façon et à aimer découvrir la campagne. Je prends des routes et des chemins que je ne connais pas. Mon plaisir est en quelque sorte de me perdre… Je découvre des lieux uniques, je traverse des bois. Parfois la petite route que j’emprunte devient un chemin qui, après plusieurs kilomètres, n’aboutit finalement nulle part. Il peut par exemple se terminer à l’entrée d’un champ… Un jour, ainsi, je suis arrivé sur un pré au milieu duquel il y avait une vieille chapelle. Je voyais un chemin qui menait à la chapelle. Je l’ai donc rejoint en traversant une partie du pré. Je suis reparti par ce chemin et j’ai fini par atteindre une autre route. Je vois des choses que personne ne voit. Bien sûr, j’ai toujours le réflexe de donner un petit coup d’œil dans les granges et les hangars que je rencontre pour voir s’il n’y a pas une ou deux 2 CV qui traînent. Un jour, comme çà, j’ai découvert et acheté un banc de scie circulaire artisanal qui était entraîné par un moteur de Citroën 5 HP avec son radiateur d’origine. »
Garage Eurorepar Francis Pierrot
2, rue des près
88140 Vrécourt
Tél. : 03 29 07 32 07
Mail : garage.fpierrot@gmail.com