2CV France 3
2CV-MCC | 18 novembre 2022
Chez les Chatard, la mécanique est une tradition familiale depuis quatre générations. Tout commence avec Firmin, l’arrière-grand-père, qui, le premier, s’installe comme garagiste à Saint-Etienne. Il crée ainsi une affaire assez importante qui faisait aussi station-service et casse. C’est son fils Léon, le grand-père de Benjamin, qui est venu s’installer en 1969 là même où se trouve encore le garage Chatard aujourd’hui.
Volontairement indépendant, Léon Chatard monte un garage multimarque, mais il se spécialise très vite dans l’entretien et la réparation des ID et des DS. Il jouit rapidement d’une excellente réputation qui lui amène une clientèle nombreuse et qui vient parfois de loin. Au cours des Années quatre-vingts, il prend sa retraite et laisse la place à son fils Jean-Jacques le père de Benjamin. Celui-ci poursuit dans la même voie et fait toute sa carrière dans l’entreprise familiale. Le garage Chatard reste multimarque et indépendant. Quant à Benjamin, la mécanique le passionne depuis qu’il est tout petit. Dès qu’il en a l’âge, il commence à faire ses premières armes sur ses vélomoteurs. Après avoir passé un baccalauréat professionnel au lycée Etienne Mimard à Saint-Etienne, il travaille pour diverses concessions pendant un petit peu moins de dix ans. Il acquiert ainsi des compétences « extérieures » qui lui seront bien utiles par la suite et qui restent encore aujourd’hui un atout de premier ordre. Il entre au garage familial en 2009 où, quelque temps plus tard et à son tour, il prend la direction de l’affaire.
Benjamin a toujours été intéressé par les voitures anciennes et en a possédé plusieurs, Renault 8, Renault Dauphine, Triumph Herald, etc. Mais sa découverte de la 2 CV est finalement assez récente. Elle remonte à une quinzaine d’années lorsqu’un monsieur est venu pour faire restaurer la 2 CV de son père décédé. C’était une 2 CV AZAM de 1965 Bleu Brouillard pleine de poussière. Elle était immobilisée depuis au moins vingt ans et il y avait tout à faire dessus. Et comme son père et ses employés d’alors avaient toutes les compétences requises, il a accepté le chantier. A partir de ce moment, il s’implique dans le projet et s’occupe de la recherche des pièces. Il apprend alors à connaître les différents modèles et versions. De fil en aiguille, il en tombe littéralement amoureux. Derrière ce chantier, il n’y a alors aucun projet, aucune volonté d’en faire un jour une spécialité. Jusqu’alors, en matière de 2 CV et de Méhari, le Garage Chatard fait plus de l’entretien et des réparations mécaniques. Ce chantier faisant l’unanimité au sein de l’équipe du garage, Benjamin prend la décision de créer une activité spécifique dédiée aux Petites Citroën. C’est lui aussi qui fait en sorte que le garage devienne Point Relais 2CV-MCC car, très vite, en tant que professionnel de l’automobile, il apprécie de pouvoir travailler avec des pièces d’origine.
Aujourd’hui, le garage Chatard compte deux mécaniciens, Xavier Jammet et Roger Talancieux, qui s’occupent essentiellement des voitures modernes. Quant à Benjamin, il se consacre entièrement aux 2 CV et Méhari (mécanique, électricité, soudure, préparation, remontage, etc.). Il y a six postes de travail, deux postes pour les 2 CV et quatre postes avec des ponts pour les voitures modernes, soit trois ponts à quatre colonnes et un pont à deux colonnes. Pour les 2 CV, tout est réalisé au garage exception faite de la peinture qui est sous-traitée à l’extérieur auprès de différentes entreprises de carrosseries. En ce qui concerne l’outillage spécifique aux 2 CV, Benjamin utilise des outils que son grand-père avait achetés à l’époque, les plus anciens datant des années cinquante…
Le garage Chatard occupe une surface de 500 m2 dont 400 couverts pour l’atelier et un bureau de 30 m2. Les locaux, datant des Années quarante, abritaient à l’origine une usine de sonnettes. Situé proche du centre-ville de Saint-Etienne, il n’est pas sur un grand axe, mais le bouche-à-oreille marche bien. Les gens viennent aussi parce qu’ils connaissent le garage depuis des années. Soixante pour cent de sa clientèle viennent de père en fils depuis trois voire parfois quatre générations. Benjamin aime à rappeler que son grand-père a commencé seul avec sa boîte à outils. Mais, le jour de l’ouverture de son garage, il y avait déjà des clients qui le connaissaient et qui attendaient derrière la porte. Il a toujours voulu rester sur une petite structure pour privilégier la qualité du travail et de la relation avec le client. Aujourd’hui, le mot d’ordre et les valeurs sont restés les mêmes. Benjamin y est très attaché. Son souhait est avant atout de préserver l’esprit de l’entreprise, de continuer sur cette voie. Même si cela a quelques inconvénients, il n’envisage surtout pas de changer de locaux. Il est confiant en l’avenir de son entreprise tout en reconnaissant avec lucidité qu’il lui faut régulièrement s’ouvrir aux technologies nouvelles. Peut-être aussi qu’il installera une cabine de peinture d’ici quelques années. Elle lui permettra d’être totalement indépendant en maîtrisant de bout en bout les chantiers de restauration et de ne plus être tributaire des sous-traitants.
Quant à la relève, Benjamin est l’heureux papa de deux garçons de 5 et 3 ans, Eliot et Siméon, qui sont fous passionnés de voitures, et surtout de 2 CV. L’un de leur plus grand plaisir est de venir au garage pour jouer avec les outils. Donc, de ce côté-là aussi, il n’y a apparemment pas trop d’inquiétudes à avoir !
Trois questions à Benjamin Chatard
Interview expresse :
● Qu’est-ce qui vous plaît avant tout dans la 2 CV et dans la Méhari ?
– « Ce qui me plaît, c’est que la 2 CV dégage en général quelque chose de convivial et de familial. Elle est sans artifice. Elle correspond à ma personnalité et à l’état d’esprit du garage. Avec elle, on va tout de suite à l’essentiel. C’est une voiture qui ne ment pas. Elle est ce qu’elle montre, ni plus ni moins. Elle ne fait pas de promesses qu’elle ne peut pas tenir, mais celles qu’elle fait, elle les tient bravement et sans problème. Et puis il y a les personnes qui l’utilisent. Ce sont des gens simples et vrais, de toutes conditions sociales. On rencontre de tout, mais à chaque fois c’est la même passion qui les anime. C’est unique. On ne voit çà nulle part ailleurs, avec aucune autre marque et avec aucun autre modèle. D’ailleurs, je refuse maintenant les chantiers de restauration d’autres modèles. Je n’ai pas le même plaisir à travailler sur d’autres voitures, et le contact humain n’a pas du tout la même qualité. Pour moi, ce sont des choses qui comptent beaucoup. Donc c’est la 2 CV et rien d’autre ! »
● Quel est votre modèle préféré ?
– « J’avais une 2 CV AZU de 1957 me plaisait vraiment beaucoup, je la regrette aujourd’hui. Pour moi, la 2 CV Camionnette est le symbole de la 2 CV travailleuse, celle qui était tout aussi bien utilisée par les petits artisans des villes et des campagnes et par les agriculteurs que par les grosses entreprises qui en avaient des flottes entières. Elle était universelle. Aujourd’hui, elle est devenue une voiture de collection avec un très fort capital sympathie du fait de son aspect utilitaire. Et puis, elle a une allure inimitable avec sa carrosserie faite quasi entièrement de tôle nervurée et ses grandes roues de 400. Sinon j’aime bien aussi les 2 CV 6 classiques. Ce sont des voitures agréables et simples à conduire. A leur volant, on peut partir en famille avec deux adultes et deux enfants. Je suis plus porté sur les modèles de série stricte plutôt que les séries spéciales et limitées. Une 2 CV sobre, d’une seule couleur me plaît mieux. Les couleurs voyantes du milieu des Années soixante-dix ne sont pas non plus celles qui m’attirent particulièrement. J’aime la sobriété lorsqu’il s’agit de 2 CV. Mais, paradoxalement, en tant que restaurateur, je préfère restaurer des séries limitées ou des 2 CV plus anciennes. Je reconnais bien volontiers que ce sont de très beaux modèles et que le résultat est toujours plus flatteur. Les 2 CV des Années cinquante ont esthétiquement quelque chose en plus avec leur capot nervuré. Aussi, les couleurs anciennes, les trois gris des Années cinquante, leur donnent vraiment une personnalité particulière. Aujourd’hui, si je devais me racheter une 2 CV, je me tournerais vers une camionnette à capot nervuré, une 2 CV AZU plutôt qu’une 2 CV AU. C’est vrai qu’avec le moteur de 425 cm3 on a quand même un peu de puissance et c’est plus agréable sur la route qu’avec le petit moteur de 375 cm3. »
● Quel est votre meilleur souvenir de petite Citroën ?
« Mon meilleur souvenir en 2 CV, c’est la première fois où je suis parti en 2 CV avec mon épouse Stéphanie et nos deux fils de trois et cinq ans, Eliot et Siméon. C’était au printemps dernier. Pour eux, cela a été une véritable révélation. Les voir heureux comme çà, derrière, installés dans leurs sièges auto, cela a vraiment été génial. Nous étions partis pique-niquer pour la journée par les petites routes de l’arrière-pays sans destination précise. C’était notre première sortie en famille en 2 CV. Maintenant, ils n’ont plus qu’une seule envie, recommencer au plus vite. Pour moi c’est une façon de leur faire découvrir des vraies valeurs, c’est le début de la transmission de quelque chose à laquelle je crois sincèrement. Depuis, je ne vous cache pas que la 2 CV est complètement entrée dans leur vie. J’espère seulement que ce sera pour toujours et qu’elle leur apportera au moins autant que ce qu’elle m’a apporté et m’apporte encore aujourd’hui ! »
Garage Benjamin Chatard
20, rue du Rozier
42100 Saint-Etienne
Tél. + Fax. : 04 77 25 14 54
Mail : garagechatard@hotmail.fr
Site : www.garagechatard.fr